L’Afrique Post-COVID19 : vers quel paradigme de Gouvernance ?

Alors que plusieurs pays commencent graduellement à sortir du confinement et suivre les premiers pas d’un dé-confinement progressif et encore hésitant, plusieurs questions se posent sur le sort du monde et des rapports multinationaux et transcontinentaux des économies et des sociétés dans un monde post-COVID19, bien que le danger du virus plane toujours dans plusieurs recoins du monde.

Il s’agit de mesurer les dégâts multiples provoqués par le coût du confinement et de l’arrêt subit par tous les aspects de la vie et de la société. Il s’agit également de mettre en place de nouveaux mécanismes en vue de relancer la machine économique et sociale, en tenant compte des divers facteurs désormais vitaux et notamment celui du temps qui, au fur et à mesure qu’il coule précieusement, élargit le fossé créé par la crise qu’il faut désormais est d’enjamber et dépasser.

Le mardi 02 juin, La Secrétaire Générale Adjointe de l’ONU et Secrétaire Exécutive de la Commission des Nations Unies pour l’Afrique (CEA-ONU), Mme Vera Songwe, a indiqué « Nous ne savons pas encore combien de temps la crise du COVID19 va durer, mais il est nécessaire de placer, dès aujourd’hui, les jalons de la reprise ». En effet, la crise sanitaire a provoqué un ralentissement économique mondial, ainsi qu’un accroissement de l’appauvrissement de la couche sociale nécessiteuse. L’Afrique n’en fait pas exception, avec un ralentissement de  la croissance estimé de 1,8 à 2,6% du PIB (selon la Commission Economique pour l’Afrique).

Le CAFRAD, en tant qu’Organisation œuvrant dans l’innovation, la modernisation et la réinvention du secteur public et de la gouvernance, ne prétend point avoir des réponses toutes faites pour répondre aux enjeux africains et aux nécessités relatives à l’administration et la gouvernance post-crise. Cependant, nous travaillons à contribuer activement à la réflexion  ainsi qu’à susciter  des débats autour des questionnements soulevés et des propositions formulés par les experts et chercheurs sur des questions touchant à l’Afrique, à la société africaine autant qu’aux  administrations  des pays d’Afrique.

Parmi les questions que l’on se pose, il y a celle de la place du continent dans le monde post-COVID19, un monde toujours marqué par des séquelles de la bataille sanitaire aux conséquences lourdes notamment pour certains pays Occidentaux. Ce que la crise nous a appris vient ainsi corroborer notre conviction quant à la pertinence et l’importance de l’idée d’une « l’Afrique pour l’Afrique »  ainsi que de la nécessité d’une gouvernance plus responsable assise sur les piliers fondamentaux que sont l’authenticité l’universalité et la transmission intergénérationnelle des savoirs et des compétences. En effet, le continent  doit  plus que jamais penser et inventer ses propres solutions et ne plus  attendre d’aide des autres pays. L’Afrique ne peut plus non plus  rigoureusement suivre aveuglément les solutions préconçues et dont la pertinence sur son espace n’est pas avérée.

Dans le court et moyen terme, la question de la gouvernance et de la gestion des pays au sortir de la crise est une question cruciale, car il s’agit de renforcer certains pans de l’administration afin d’accélérer la relance économique  à travers notamment la mise en place d’un plan de redynamisation économique et d’aide aux entreprises touchées par la crise, ainsi que l’encouragement de l’économie numérique en facilitant l’accès au  numérique. A cela on pourrait ajouter le  réajustement social  grâce à la mise en place de plan d’absorption du chômage provoqué, travail sur les problèmes engendrés au niveau de l’éducation et de l’arrêt de la scolarité provoqué surtout chez les élèves n’ayant pas eu accès à l’enseignement à distance tout en gardant en ligne de mire les mesures de sécurité sanitaire au risque de provoquer une deuxième vague de contaminations que les pays d’Afrique ne seront   peut-être pas prêts d’absorber.

Sur le long terme, des réflexions peuvent se pencher sur une nouvelle manière de penser des rapports internationaux  et la dynamique de solidarité et l’entraide africaines, en redynamisant les relations entre les pays de l’Afrique  par la relance des plans visant à renforcer les liens entre les pays sur plusieurs champs (économie, sécurité, échanges de bonnes pratiques…). L’encouragement de la consommation domestique et du renforcement des liens entre pays voisins aidera sur le long terme les pays de l’Afrique à alléger leur dépendance par rapport à l’extérieur en mettant en place les premiers jalons d’un développement économique durable.

Au chapitre  de la sécurité sanitaire et de la prévention des crises : le deuxième trimestre de l’année 2020 aura sans doute été une leçon pour les Etats quant à l’importance de la prévention des crises. La redistribution des chaînes de valeur est donc une mesure importante, parce que  toute réforme de gouvernance prévue doit désormais tenir en compte de  la question de la disponibilité d’une infrastructure sanitaire complète et suffisante pour gérer de façon régulière et autonome les besoins du pays (allant du développement de l’industrie pharmaceutique aux plans de construction d’hôpitaux et de cliniques, ainsi que de la formation du corps médical et infirmier). C’est une préoccupation qui  nous amène, naturellement, à la question du transfert de la technologie et  de l’éducation des jeunes, qui doivent tout aussi avoir une place importante dans toute réforme de gouvernance.

L’enjeu du changement climatique et l’importance d’intégrer les valeurs de l’éthique et de la protection environnementale dans tout plan de réforme, autant  que la question des clivages sociaux, les questions culturelles et notamment celle du racisme, des violences raciales et de la discrimination, des crises provoquées par l’humain contre l’humain et contre la nature, sont autant  d’enjeux auxquels il faut se pencher au même titre que les enjeux cités plus haut. S’il ne sont pas effectivement traités lors dans le cadre des  réflexions sur les questions stratégiques de réforme et de développement des pays, cela pourrait à terme  provoquer de graves séquelles qui peuvent, au même titre que la crise sanitaire actuelle, brusquement déstabiliser et ébranler  l’équilibre du monde et  celui des Etats.

(Bouziani Basma)

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